Spirale Dynamique et cosmogonie

Jorune

À chaque vMème est associée une certaine idée du monde, une certaine conception qui s'affine au fur et à mesure que l'être humain acquiert les capacités cérébrales permettant de gérer une plus grande complexité. Pourtant, les multiples approches cosmologiques qui en résultent semblent pouvoir être classées en deux types distincts : les vMèmes associés aux couleurs chaudes se représentent le monde à partir de son centre, les vMèmes associés aux couleurs froides développent des approches circulaires.

AN-BEIGE : le monde est ce que j'en perçois, debout sur mes jambes

« Partout autour de lui des paysages centrés sur sa frêle personne, où qu'il se trouve, de quoi lui donner la sensation d'être le centre, le nombril du monde. » (Patrick Baudry) Citer un spationaute pour décrire la perception du monde selon AN peut paraître de prime abord incongru et un rien anachronique. Pourtant, je n'ai pas trouvé de phrase plus juste pour décrire le monde selon ce niveau d'existence : l'homme vient de se redresser sur ses jambes et de quitter son habitat forestier ; le monde est ce qu'il en perçoit au moment où il le regarde, et lui-même en est le centre.

Ces deux notions de centre et de verticalité seront déclinés par la suite dans tous les vMèmes chauds de la Spirale Dynamique, mais ils s'expriment ici sous leur plus simple apparence.

BO-VIOLET : la sphère magique suit le cycle des saisons

Patrick Baudry poursuit ainsi son récit : « Heureusement pour lui, il existait aussi cette horizontale qui limitait d'elle-même les excès de la verticale et délimitait ainsi son environnement dans une demi-sphère quasi magique. » Voici une belle description de la capacité d'un vMème à corriger les dérives des vMèmes antérieurs.

Lorsqu'on parle d'astronomie et de préhistoire, on pense immanquablement aux mégalithes de Stonehenge. Cependant, la découverte du caractère cyclique des événements célestes est une trouvaille bien plus ancienne, et Stonehenge n'est pas le fruit d'une culture BO.

En effet, pour l'homme de Cro-Magnon, savoir mesurer le temps et comprendre le cycle des saisons, c'est assurer la survie de la tribu : on peut prévoir la date de migration des oiseaux, l'apparition de certaines plantes aux vertus alimentaires, curatives ou magiques, la fin de l'hiver ou bien celle de l'été, et avec elle la nécessité de se déplacer vers tel ou tel terrain de chasse. Ainsi, on a découvert des os gravés qui seraient en réalité des calendriers lunaires : l'os coché n° 450 de la grotte de Taï (10.000 ans av. J.-C.) était la propriété d'un groupe de chasseurs purement BO. Une chercheuse française a récemment observé que l'entrée des grottes ornées du sud-ouest de la France était alignée sur les levés ou couchés du soleil au solstice d'hiver ou d'été, conférant aux peintures rupestres un éclairage particulier. Aujourd'hui encore, dans un pays tel que la Corée où le chamanisme est une tradition vivace, le calendrier lunaire détermine un certain nombre de fêtes religieuses liées au culte des ancêtres.

L'éternel retour des saisons était un élément prévisible, donc rassurant, pour nos ancêtres qui lui attribuaient un caractère magique. C'est aussi la première manifestation du cercle (sous forme de cycle), qui est une constante des vMèmes froids.

CP-ROUGE : le pilier du ciel

La vision du monde de l'être humain dominé par CP est l'exact pendant de sa conception de la société : exit le cycle éternel maintenu par le respect des tabous. ; CP est venu, il a vu la nature et l'a vaincue. CP a inventé la hiérarchie : le monde sera désormais plat mais étagé ! En bas, le monde sous-terrain où on a relégué les vaincus, les ancêtres BO, leurs shamans, et les ennemis ; au milieu, le monde des hommes où se déroulent les combats ; dans le ciel, les dieux dans leurs chars volants. Pour maintenir tout cela en place, un pilier est placé au centre du monde. Tantôt c'est un arbre gigantesque (Germains ou Vikings), tantôt un géant tel Atlas portant le ciel sur ses épaules, et parfois encore un véritable pilier (mythologie méso-américaine). La destruction du pilier entraîne la fin du monde…

Bien entendu, le cycle du temps continue d'exister, mais il est entièrement maîtrisé par le roi-sorcier qui discute avec les dieux et leur offre autant de sang que nécessaire pour qu'ils puissent travailler correctement ! Ainsi, dans la mythologie grecque, Zeus destitue son père Chronos (le temps) et le remplace comme chef du panthéon. Il confie à deux de ses enfants (Artémis et Apollon) le soin de gérer la course de la lune et du soleil. De même, les premiers pharaons (ceux du 1er empire) portent le titre d'Horus. Ils sont l'incarnation du dieu faucon vainqueur du chaos, dont l'un des yeux est le soleil et l'autre la lune. L'Europe occidentale n'est pas en reste. Quoique technologiquement moins avancée que les civilisations du Proche et Moyen-Orient de la même époque, le néolithique et le chalcolithique européens sont bien des périodes CP. En effet, la sédentarisation a entraîné de profonds bouleversements sociaux : les plus forts ont désormais la possibilité de stocker des richesses, d'entretenir des artisans spécialisés qui créent des objets de prestige en pierre, en os ou en cuivre, et de se faire ériger des constructions monumentales pour leur plus grande gloire et celle de leur tribu. Ainsi le calendrier géant de Stonehenge est l'œuvre de prêtres-sorciers travaillant pour un chef suffisamment puissant pour mobiliser l'énergie de son peuple (ou de ses captifs) à la construction d'un tel monument !

En s'assurant la parfaite maîtrise des croyances BO, le chef CP s'accapare le pouvoir spirituel en même temps que politique. En dressant vers le ciel ses pyramides ou ses mégalithes, il affirme sa puissance et impose le respect.

DQ-BLEU : la sphère de la complétude

« Apprends donc toutes choses
Et aussi bien le cœur exempt de tremblement
Propre à la vérité bellement circulaire,
Que les opinions des mortels, dans lesquelles
Il n'est rien qui soit vrai ni digne de crédit. »
(Diogène Laërce, IX, 22)

Ce n'est pas un hasard si les premiers à avoir pu concevoir un monde sphérique sont les civilisations de DQ. Bien que considéré à juste titre comme préscientifique, DQ est capable de rigueur. Il a formalisé l'architecture et la géométrie ; il a calculé π et finit par admettre que 0 n'est pas rien, mais un chiffre à part entière qui marque la borne inférieure de sa vision du monde : l'alpha, le début… Il est le premier à fixer les frontières, à pouvoir s'imaginer le monde dans sa complétude. L'historien Jean-Louis Brunaux écrit à ce sujet : « Le ciel, dès lors conçu comme une voûte jouissant d'une solidité architecturale, pouvait se soutenir lui-même. »

Les premiers européens à avoir écrit que la Terre était une sphère furent les savants grecs et hellénistiques. Précisons que la culture grecque antique, celle de Mycènes, celle de l'Athènes de Périclès ou plus tard celle qui fut conquise par les Macédoniens, n'est pas une civilisation DQ mais CP. Ainsi, la démocratie athénienne ne compte que 10 % de votants qui sont l'équivalent des guerriers des peuples barbares : c'est parce qu'ils prennent les armes pour défendre leur ville qu'ils ont le droit de voter. Les temples glorifient le dieu protecteur de la cité et la mythologie, les héros qui se sont distingués au combat.

Cependant, dans ce contexte CP, DQ finit par se développer sur le plan intellectuel, un peu comme il l'avait fait en Égypte 2500 ans plus tôt, en partie grâce à la bienveillance de CP à l'égard de ceux qui rehaussent son prestige. Le premier de ces grands penseurs fut probablement Pythagore (580 av. J.-C.–487 av. J.-C.) qui serait le premier à s'être qualifié lui-même « d'amoureux de la sagesse » (en grec philosophe), à avoir prôné une pensée rationnelle (logique), et à avoir utilisé le terme de cosmos. Son disciple Parménide d'Élée fut l'inventeur de la Terre ronde. Vers 200 av. J.-C., Ératosthène calcula la circonférence de la Terre. Ces savants décrivirent un univers où la Terre sphérique était immobile au centre de la voûte céleste. La lune, le soleil et les planètes tournaient autour d'elle avec des orbites plus ou moins ordonnées (le mot planète veut dire errante). Les comètes, dont on ne pouvait prévoir les passages, annonçaient des événements exceptionnels comme la naissance d'un messie.

Au IIIe siècle avant notre ère, Ptolémée formalisa toutes ces connaissances dans un catalogue de 48 constellations, un modèle qui perdura jusqu'à la renaissance.

Jean-Louis Brunaux pense que l'expression « le ciel nous tombe sur la tête » attribuée aux Gaulois est une des preuves selon laquelle les druides avaient eux aussi acquis la certitude que la Terre était ronde : l'effondrement de la voûte céleste entraînant la dissolution du monde dans l'eau et le feu. Du pont de vue de la Spirale Dynamique, cette idée a du sens car la pensée druidique est l'une des premières tentatives dans notre pays de contrôler les excès de CP par DQ. Les druides utilisèrent pour ce faire les mêmes méthodes que l'Église médiévale :

  1. Récupération et intégration des croyances et pratiques plus anciennes au sein du druidisme (les sacrificateurs et les poètes devinrent ainsi des ovates et des bardes) ;
  2. Encadrement moral de la chevalerie celte (le mot vassal en usage à l'époque féodale est le descendant direct du mot gaulois basso qui désigne le « client » d'un puissant) ;
  3. Promesse de récompenses ultérieures (les druides, comme les pythagoriciens, croyaient en l'immortalité de l'âme et à la réincarnation).

Jean-Louis Brunaux n'exclut par la possibilité de contacts plus ou moins étroits entre le monde grec et la Gaule qu'il qualifie de « nation en devenir ».

Les druides eurent toutefois moins de succès que l'Église médiévale : développer DQ alors que le bassin méditerranéen tombe peu à peu sous l'influence romaine n'était pas évident. Peu à peu, le clientélisme et le goût du prestige ont grignoté l'idéal philosophique des druides, et plusieurs dizaines d'années avant la conquête militaire par César, l'élite gauloise était déjà partiellement romanisée.

La Vérité Ultime ayant tout prévu dès le début, le monde peut être fermé. Il existe un début des temps (création) et une fin des temps (apocalypse) où la volonté de la Vérité ultime sera accomplie. À l'intérieur de cette période, tout un chacun peut se rapprocher de la Vérité Ultime en accomplissant Sa volonté. Est-ce à dire que le temps serait également « circulaire » pour DQ ? C'est la théorie que défendent Dudley Lynch et Paul L. Kordis dans La Stratégie du Dauphin : « Les longues ombres du passé pèsent lourdement sur la perspective du futur qu'entretient la carpe [ainsi appellent-ils DQ], ce qui limite l'ampleur et la portée des nouvelles idées. […] Ainsi quand le futur crée le présent, le présent est libéré pour recréer le passé : une fois de plus, la vision du temps circulaire qu'a la carpe est préservée. » À la lecture de ces lignes, je ne peux m'empêcher de penser à l'évolution du dogme dans l'Église catholique romaine, ou à cette citation tirée de 1984 de George Orwell : « Qui contrôle le passé contrôle le futur, qui contrôle le présent contrôle le passé. » Toutefois, contrairement à BO, DQ est capable de se projeter très loin dans le futur pour peu que la V érité Ultime lui trace le chemin, et c'est même là ce qui nourrit ses efforts.

ER-ORANGE : l'horizon Starbuck

ORANGE sait que le monde n'est physiquement pas plat, il sait aussi que la Terre est en mouvement autour du centre de la galaxie et que la voie lactée elle-même n'est qu'une pièce de l'amas de la Vierge. Et pourtant, une fois BLEU dépassé, ER continue de se représenter le monde sur un planisphère, car il a l'impression que TOUT se gère. Le temps lui-même « est de l'argent » et peut être raccourci.

En effet, ER a découvert la fonction exponentielle : il en use (et en abuse) et la régression linéaire (y = ax + b), la première fonction mathématique établissant une relation de cause à effet, lui paraît assurément inefficace.

ER a aussi découvert la répartition statistique et pense pouvoir s'affranchir lui-même de la règle générale, être le 1/100 000 000 000e qui sort de l'échantillon « moyen ». La description faite dans La Stratégie du Dauphin de Dudley Lynch est à ce titre tout à fait éloquente : ER s'imagine en dauphin, nageant au-dessus des carpes (BLEU), des requins (ER malsains), des carpes pseudo-éclairées (FS), alors qu'il n'est en définitive au mieux qu'un requin-baleine (c'est-à-dire un requin pseudo-éclairé, animal dont il nie lui-même l'existence).

Dans son essai Une brève Histoire de l'avenir, l'économiste Jacques Attali décrit le déplacement progressif du centre du monde, du bassin méditerranéen à l'Europe du Nord, puis au continent nord-américain. Pour Friedman, le centre s'est déplacé en Asie avec une Chine et une Inde hyperagressives. Quant au Professeur Aldo Levy, spécialiste de l'analyse de la valeur, il décrit un monde où les « hubs » centres informatiques et décisionnels des multinationales sont les nouveaux donjons du pouvoir économique. Hors du hub, point de salut !

Le paradoxe de ER semble être le suivant : le progrès scientifique a été si rapide que l'individu dominé par ER n'a pas été en mesure d'assimiler les conséquences induites pas toutes les connaissances qu'il a lui-même générées ! Il en est resté à la découverte majeure de la Renaissance qui a permis l'éviction de DQ : la Terre tourne, elle n'est pas fixe dans le ciel. Le centre du monde ER se déplace, et il vaut mieux savoir en suivre le mouvement si on veut faire partie des « gagnants ».

FS-VERT : le cocon et le ver

« Entre les bio-catastrophistes qui annoncent la fin de l'Homme programmée et les techno-prophètes pour lesquels ne se dessinent pas moins que les traits d'une post-humanité triomphante, c'est toute la querelle du progrès qui transparaît : comment évaluer la portée des accélérations foudroyantes de la techno-science […] et en déterminer les conditions de juste développement ? ». ( Jean-François Collange, ancien membre du comité national de bioéthique.)

DQ fut le premier à imaginer un monde fini, mais avec DQ, fini signifie avant tout complet car la Vérité Ultime a pensé à tout depuis le début. Pour FS vert, fini signifie limité : le monde est la portion congrue de l'Univers, une pomme mangée par le méchant ver ER comme sur la couverture du livre de Luc Sante, My lost City.

L'astrophysicien Hubert Reeves, à ses heures Président de la Ligue de protection des oiseaux, a raconté dans l'une de ses conférences sa « conversion » à l'écologie VERTE en ces termes : « J'ai longtemps été un partisan du nucléaire, et puis un jour j'ai pris conscience que le nucléaire aller créer davantage des problèmes insolubles pour les générations à venir : nous n'avons en effet aucune solution pour le traitement de déchets dont la demi-vie s'étale sur des milliers d'années. » Cet aveu d'impuissance face aux déchets nucléaires affole ER. Un problème sans solution est une véritable hérésie pour celui qui cultive le progrès et qui a oublié que zéro était autre chose que rien. FS admet une nouvelle grandeur mathématique dans le champ du possible : l'ensemble vide.

En mathématique, si vous vous amusez à tracer la fonction favorite de ER, y = ex, vous obtenez une courbe qui s'élève rapidement vers l'infini. Rien à voir avec la croissance régulière de la progression linéaire (y = x). FS découvre pour sa part l'existence d'une autre fonction, exacte symétrique de l'exponentielle par rapport à la droite de la progression linéaire : le logarithme népérien. Le logarithme finit par rejoindre l'infini : FS est tout simplement moins pressé de générer des solutions capables d'engendrer des problèmes sans solution.

FS entretient l'illusion qu'en ralentissant la cadence mondiale, en brûlant moins d'énergie, en évitant de blesser autrui dans ses sentiments ou ses convictions profondes, il pourra maintenir son « cercle » communautaire, la course de sa voiture à énergie solaire autour de la Terre, la recomposition de sa famille au gré des rencontres, le consensus autour de ses projets… Là, où ER se focalisait sur les hubs, FS privilégie les connexions et reconstruit peu à peu les cercles autour des centres de ER. Dès lors, « l'humanité d'un être humain tient moins dans son potentiel génétique que dans le réseau de relations qui le tissent, le modèlent et qu'il modèle à son tour ».

Que conclure au sujet du cercle FS ? Il n'a pas la régularité de la sphère DQ, et ce n'est d'ailleurs plus un cercle mais une ellipse puisqu'il a plusieurs centres, héritiers des hubs du précédent vMème. Il n'a plus non plus la même pérennité car le progrès a fait vaciller les certitudes de DQ. Toutefois, FS ne s'est pas réconcilié avec la notion de déclin qui demeure une grosse source de souffrance pour lui-même et pour ses relations.

A'N'-JAUNE : le centre de l'espace

Dans le cas du spationaute Patrick Baudry, c'est la modification des perceptions sensorielles dans un univers particulièrement hostile qui a été le facteur déclenchant du passage vers GT. L'expérience de l'apesanteur et la perte de la verticalité qui en découle mettent l'organisme à rude épreuve. Le sens de l'équilibre en est profondément affecté, mais avec lui, la plupart des fonctions circulatoires du corps et musculaires qui n'ont pas été conçues pour fonctionner dans un environnement de microgravité. L'entrée en GT a donc été avant tout pour ce cosmonaute un phénomène physiologique, et la perte des repères habituels amène à s'interroger sur sa place dans cet univers foncièrement hostile qu'est l'espace.

La notion de deuxième boucle, GT étant aussi dénommé A'N', prend alors tout son sens, et la référence aux australopithèques de la savane mentionnée au début de cet article ne saurait être fortuite.

Dès lors, où est le centre du monde ? Est-ce l'Arctique comme le montre la représentation la plus courante de l'icosaèdre de Buckminster Fuller ? Si le problème à résoudre est lié à l'écologie environnementale, c'est fort possible. Cependant, depuis ER, le centre peut se déplacer sans provoquer l'effondrement du système et depuis FS, deux centres ou plusieurs centres peuvent même cohabiter pour former une nouvelle figure : l'ellipse. A'N' ajoute un degré de complexité à l'ensemble en attribuant à chaque centre FS une pondération variable, dans le temps, en fonction des événements. C'est donc le barycentre du système qui se déplace, et ce déplacement ne met pas en péril l'existence des centres FS. Dans tous les cas, ces centres n'ont plus besoin d'être forgés par l'être humain : « Les atomes dont nous sommes faits ont été forgés dans les étoiles » déclare Hubert Reeves ; « cette prise de conscience est pour moi le plus grand apport de la science du XXe siècle. »

La prise de conscience de la réalité des progressions non linéaires, qui sont regardées à partir de A'N' de manière plus factuelle, et par conséquent avec un certain détachement, est une source d'incompréhension constante pour les deux vMèmes précédents. Toutefois, il est vrai que le résultat de l'équation n'avait rien d'évident ! ER avait tout d'abord tranché le lien entre le magique et le vivant créé par BO (réforme protestante du XVIe siècle) puis entre le divin et le vivant (progression de l'athéisme au XXe siècle) laissant le vMème suivant se débrouiller avec une situation où la mort, pour inéluctable qu'elle soit, n'offre plus la consolation de rejoindre les ancêtres ou bien la certitude d'être assis à la droite de la Vérité Ultime. Il a fallu un peu de temps pour arriver à la conclusion que « nous » sommes tous des poussières d'étoiles plus ou moins savamment agencées et que le « nous » englobe absolument tout le monde, c'est-à-dire entre autres :

  • les méthanogènes apparus il y a 3,5 milliards d'années ;
  • les cyanobactéries, inventeurs de la photosynthèse ;
  • les diatomées qui peuplent les prairies des mers ;
  • les lépidoptères, coléoptères, hyménoptères et autres arthropodes ou dérivés ;
  • les végétaux à fleurs dont le séquoia dont je reparlerai ultérieurement ;
  • et bien entendu, la dernière espèce apparue au moment où j'écris ces lignes et dont la population croit rapidement : le virus de la grippe A (H1N1) !

B'O'-TURQUOISE : l'écorce du séquoia à l'épreuve du principe de Carnot

« Si vous avez du mal à admettre qu'un objet aussi gigantesque et apparemment inanimé que la Terre soit un être vivant, alors il peut être utile de comparer la planète à un séquoia. Cet arbre géant est indubitablement vivant et pourtant il est composé à plus de 97 % de bois mort. La mince couche périphérique de cellules vivantes (appelée cambrium) située juste au-dessous de l'écorce est ce qui fait vivre et pousser l'arbre. » Telle est la métaphore utilisée par James Lovelock pour expliquer en quelques lignes sa théorie. La métaphore du séquoia place indubitablement cette première vision B'O' du monde dans la catégorie des représentations circulaires de la planète. L'alliance d'éléments « vivants » et « minéraux » pour décrire le système caractérise les représentations propres à la deuxième boucle.

Une seconde citation, du même auteur, me semble illustrer la relation dépassionnée avec le déclin propre à ce vMème : « À partir de ma réflexion sur Gaïa, je conçois un univers auto-organisé et impulsé par l'énergie de sa propre dégradation. » Et de conclure, « verser dans le pessimisme est aussi stupide que d'utiliser une lampe électrique pour voir dans le noir en escomptant que la pile dure éternellement. » Bref, alors que les précédents vMèmes focalisaient leur attention vers l'infini, le niveau zéro, le zéro absolu est le nouvel horizon du géophysiologiste B'O'. Cette inversion de la perspective est peut-être le plus grand apport de ce vMème.

Une conclusion provisoire à la problématique de la bouteille de Coca-cola ?

Bien que la définition du centre et du cercle évolue significativement d'un vMème à l'autre, l'alternance entre les deux figures persiste jusqu'aux « plus hauts » niveaux de la Spirale Dynamique exprimés à ce jour. Et cela amène à s'interroger sur la notion d'horizon. Dans Les dieux sont tombés sur la tête, un bochiman doit jeter hors du monde une bouteille de Coca-cola qui sème la zizanie dans son clan. Après un long voyage, il atteint une falaise qui surplombe une vallée couverte par les nuages. Il jette la bouteille dans le gouffre et s'en retourne chez lui, certain d'avoir accompli sa mission. Tout comme le bochiman de cette histoire, en privilégiant une perspective par rapport à l'autre, les différents vMèmes en viennent toujours à oublier que la réalité du monde qui les entoure ne se limite pas à ce qu'ils en perçoivent. Un peu comme si les vMèmes devenaient myopes et fixaient eux-mêmes leur propre horizon.

Médiagraphie

Au sujet des grottes paléolithiques du sud-ouest de la France et de leurs relations supposées avec les phénomènes astronomiques : Archéociel.

Bibliographie

Attali, Jacques. Une brève Histoire de l'avenir. Paris (France), Fayard, 2006.
Baudry, Patrick. Le Rêve et l'espace. Paris (France), Éditions du Chêne – Hachette Livres, 2002.
Brunaux, Jean-Louis. Nos ancêtres les Gaulois. Paris (France), Seuil, 2008.
Collange, Jean-François. La vie. Quelle vie ? Paris (France), Éditions Olivétan, 2007.
Friedman, Thomas L. La Terre est plate : une brève histoire du XXIe siècle. Paris (France), Saint-Simon, 2006.
Lovelock, James. Gaïa : une médecine pour la planète. Paris (France), Éditions Sang de la terre, 2001.
Lynch, Dudley & Kordis, Paul L. La Stratégie du dauphin : Les idées gagnantes du XXIe siècle. Montréal (Québec), Éditions de l'Homme, 1979.
Reeves, Hubert. "Nous faisons partie de l'histoire du cosmos". Sciences et Avenir. Paris (France), Hors-série no 158, mai-juin 2009, pp. 6-11.
Sante, Luc. My lost City. Paris (France), Éditions Inculte, 2009.

Cet article fait l'objet d'une discussion sur le blog « Et à l'aurore ».
Les opinions émises dans cet article sont celles de l'auteur et n'engagent aucunement IDEOdynamic®.

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